mardi 23 mars 2010

Conférence : L'université camerounaise sur le rétroviseur

Des enseignants d'histoire et d'économie en ont fait le bilan et ont évalué les cinquante ans au cours d'un cours à l'Istag de Yaoundé.

Servant de cadre à cette réflexion dont le thème était "Université camerounaise : Dynamiques, ruptures et permanences d'une réalité plurielle", l'Institut supérieur de technologie appliquée et de gestion (Istag), partenaire de l'Université de Yaoundé II Soa, sacrifiait ainsi à l'exigence académique du module "Conférence" ayant cours dans le système Lmd. De fait, à travers ce module, étudiants et enseignants définissent ensemble les contours des connaissances à acquérir tout au long de leur apprentissage.

Cette conférence a donc permis d'en savoir un peu plus sur les travaux de l'historien Achille Bella récemment soutenu devant un jury à Yaoundé I et ayant porté sur l'évolution de l'institution universitaire au Cameroun. Et selon Philippe Blaise Essomba, chef du département d'histoire à la Faculté des Arts, lettres et sciences humaines de Yaoundé I, par ailleurs directeur de recherche d'Achille Bella, pour mieux cerner cette évolution, "le jeune chercheur est remonté jusqu'au 19ème siècle. Une période au cours de laquelle l'université s'impose dans le monde occidental comme une réalité incontournable pour la gestion des savoirs et par extension comme un des moteurs principaux du développement d'un Etat".

Agé d'à peine un an, souligne l'historien Achille Bella, "le Cameroun, en 1961 devait s'affirmer comme un Etat souverain. Et la création d'une université était justement un des éléments d'affirmation de notre souveraineté". C'est ainsi qu'avec l'aide de la Fondation française -une institution politique ayant pour but d'accompagner les jeunes Etats africains appartenant au pré carré français d'accéder progressivement à leur autonomie-, le Cameroun va créer une institution universitaire. Malgré le fait qu'elle existait en terre camerounaise, la plupart de ses programmes d'enseignement étaient soumis au contrôle de la France par le biais de la fondation sus évoquée. Ce qui amène Achille Bella à préciser que "juste après l'indépendance, cette Institution universitaire était biologiquement camerounaise, mais institutionnellement, elle était française".

Une situation qui va progressivement changer de 1961 à 1980, puisque les colons devaient se retirer des jeunes Etats africains afin de les laisser présider eux-mêmes aux destinées de leurs citoyens. Ensuite viendra la période des grandes réformes -1990 et 2000- à partir de laquelle l'on vera cette institution changer graduellement avec la création d'autres centres universitaires dans plusieurs régions du pays en dehors de Yaoundé. Notamment à Douala, Buea, Ngaoundéré, etc. Les traveaux d'Achille Bella lui ont également permis d'étudier cette Institution universitaire en tant qu'une réalité sociale. De fait, l'Université étant faite d'Hommes -par ailleurs acteurs de son histoire-, on y retrouve en dehors des enseignants, plusieurs autres corps de métiers faisant partie intégrante de son personnel.

Le chercheur citera dans la foulée des chauffeurs de véhicule, des bibliothécaires, etc. Cet aspect social de l'institution inversitaire a permis à l'économiste Yves André Abessolo, chef de département d'économie Internationale à l'Université de Yaoundé II, d'évaluer l'évolution des missions qui lui étaient assignées depuis sa création en 1961 jusqu'à nos jours. En effet, après l'indépendance "l'université avait pour but de former l'élite chargée de remplacer l'administrateur colon" va-t-il souligner. Seulement, le manque de contrainte n'a pas suscité l'intérêt de professionnaliser les enseignements dans une optique de développement. Selon Yves ABessolo "on avait longtemps décrié cette formation générale au sein de l'université camerounaise".

Ce qui a eu pour corollaire de soumettre la plupart des diplômés de cette Université camerounaise au chomage en partie tributaire du climat de crise économique dans lequel elle évolue aujourd'hui. Pour avoir un début de solution il a fallu attendre "la naissance des instituts privés de formation supérieure, pour voir les enseignements se professionaliser dans le souci de répondre à la demande d'un marché de l'emploi en distortion, car il y a eu depuis les années 1990 de nouvelles formes d'emplois". Ces contraintes liées à la crise économique ont donc obligé l'institution universitaire camerounaise à changer de paradigme. Au lieu de se contenter de former uniquement l'élite, l'Université a désormais pour missions de produire des connaissances concrètes et utiles s'adaptant aux besoins réels du marché de l'emploi.

A. Ntonga (Stagiaire)

Mutations

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