lundi 27 octobre 2008

Universités : Où est passé le Conseil de l’enseignement supérieur ?

Cette instance, qui devrait se tenir tous les deux ans, ne s’est pas réunie depuis l'accession de Paul Biya à la magistrature suprême.

Jeudi 23 octobre 2008, le secrétariat permanent du Conseil de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique et technique, situé dans le cabinet du ministre de l'Enseignement supérieur, au 10ème étage de l'immeuble ministériel numéro 2, a ouvert ses portes, comme tous les jours ouvrables.
Le secrétaire permanent, Guillaume Bwélé, est absent de son bureau, tout comme la veille. Toutes les tentatives du reporter pour le rencontrer sont restées vaines. Au téléphone, il s'est contenté de dire que "seul le président de la république peut convoquer le conseil de l'enseignement supérieur", et d'ajouter que "seul le ministre est habilité à en parler".

Si elle déchaîne les passions dans le corps enseignant, l'évocation du Conseil de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique et technique crispe les fonctionnaires du ministère de l'Enseignement supérieur (Minesup) et du ministère de la Recherche et de l'Innovation (Mineresi). Et pour cause, ce conseil devrait se tenir tous les deux ans. Or la dernière session, la troisième du genre, remonte à 1982, précisément du 20 au 23 octobre, à quelques jours de la démission d'Amadou Ahidjo du poste chef de l'Etat. Entre 1982 et 2008, il ne s'est jamais tenu.

En 2004, alors que Jean-Marie Atangana Mebara est ministre de l'Enseignement supérieur, un dossier est présenté au président Biya, qui crée un secrétariat permanent du Conseil de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique et technique confié à Guillaume Bwélé. Tout est fin prêt pour la tenue du conseil. L'agenda du président a souvent été évoqué ça et là pour expliquer cette résurrection manquée. Depuis lors, le secrétariat du Conseil de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique et technique fonctionne quand bien même le conseil qu'il prépare sans cesse ne s'est jamais tenu jusqu'ici. Les deux ministères concernés abritent en permanence toutes sortes de réflexions destinées à renouveler et adapter l'enseignement et la recherche.

En 1997, le rapport d’évaluation de la réforme universitaire de 1993, présenté par une commission composée de 22 enseignants a fait des propositions pour un meilleur système d’enseignement, sur la base des faiblesses du système des Uv.

Créé par décision n°04/0054/Minesup/CAB du 3 mars 2004, le comité technique de réflexion pour l’amélioration du système national de l’enseignement supérieur s’était vu assigner 4 missions dont « la contribution au document de stratégie sectorielle de l’enseignement supérieur pour la période 2005-2015 ». Les membres de ce comité ont analysé et critiqué une dizaine de rapports antérieurs proposant des orientations stratégiques pour l’amélioration de l’enseignement supérieur. Ils ont également produit des réflexions personnelles sur leurs visions respectives de l’université. La synthèse de ces travaux a été rendue publique la même année.

Les auteurs de ces études se plaignent de ce que leurs propositions n'aient jamais été prises en compte. En l'absence de la tenue du Conseil de l’enseignement supérieur, il n'y a pas de cadre adéquat pour réfléchir profondément à ces questions. Pour Raymond Ebalé, chargé de cours à l’université de Yaoundé I, le Conseil de l’enseignement supérieur est « l’équivalent, chez les universitaires, du Haut conseil supérieur de la magistrature chez les magistrats ».

L’historien de l’économie poursuit en confirmant que « cette institution a jadis constitué le cadre où l’ensemble des problèmes relatifs aux universités et aux universitaires étaient débattus et solutionnés. ». Le fait qu’il n'ait pas été convoqué depuis 26 ans est-il un "oubli politique" ou une "volonté politique ?" Toujours est-il que, pour lui, la dégradation du statut de l'enseignant est l'une des conséquences de cette désaffection : "Ce conseil avait une dimension symbolique, en ceci qu'il permettait de donner la mesure du respect voué au corps enseignant." Se souvenant du dernier conseil qu'il a vécu comme étudiant, il déclare : "Il s'était ouvert par une plénière au cours de laquelle le président Ahidjo avait fait une déclaration publique, au palais des congrès. Tous les enseignants étaient invités. Ensuite, il y avait des travaux en commissions à l'issue desquels des recommandations étaient édictées. Le président Ahidjo les appliquait systématiquement."

Toute la communauté universitaire est unanime sur l'urgence de la tenue d'un conseil de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique et technique. Les sujets à mettre sur la table ne manquent pas : les infrastructures, le statut de l'enseignant, le développement de l'enseignement, les contenus, la professionnalisation, etc.

Écrit par Maurice Simo Djom

http://www.lejourquotidien.info/index.php?option=com_content&task=view&id=820&Itemid=57

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